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Sur la série "Faits-diserts"

Le travail photographique de maurice Coussirat, dans la série "Faits diserts", instruit à l’égard du réel photographique une dé-localisation du regard. Voir une image photographique, c’est jouer sur la perception réaliste du contenu photo-graphique et travailler une perception réalisante induite
par la technologie informatique. L’image photographique est une image qui cherche son site propre, son lieu et son instant d’exposition.
Où se situe une telle image qui dit un réel par le biais d’une légende (dans tous les sens du terme : un texte désignant ce qu’il y a à regarder et un récit déconstruisant la signification de ce texte).
Si la réponse d’évidence suggère que le site propre d’une telle image est l’écran, elle néglige la possibilité d’un regard sur l’image qui est encore aussi pour maurice Coussirat, un regard tableau. Il y a une certaine manière d’aborder le réel, une certaine distance prise avec lui dans la manière dont la photographie se présente à la fois comme une énigme à déchiffrer (un texte) et une surface à regarder (une image).
La procédure informatique permet de reconstituer une expérience sensible du réel en dégageant par l’inscription d’un élément inattendu la possibilité d’une signification. Signification aussitôt remise en question du fait de sa probable manifestation technique .
L’image fait vaciller un instant la légitimité du langage à dire le monde mais elle fait aussi vaciller l’usage habituel que nous avons du sensible.
L’ironisation n’est donc pas seulement une tonalité critique sur le contenu de l’image, c’est aussi, pour le photographe, une façon de demander à notre regard d’envisager comment se construit un mode de représentation du monde dans et par le sensible. Ce que l’image instaure, ce n’est pas une manière d’être au monde ni un être en commun du monde mais une manière de faire avec le sensible du monde, de faire avec le réel du monde. 
Entre le sens (le texte qui s’étire comme une forme sensible qui fait trace sur la neige) et le paysage, c’est de là que dans la conscience de l’ironisation peut apparaître une perception sensible inédite.
La photographie travaille alors la question du vraisemblable et de la vraie semblance et permet de tenir à distance le problème de la ressemblance. Il ne s’agit plus de chercher dans l’image les points d’identité qui font son rapport au réel, il faut que l’image construise une perception du sensible du réel, que la radicale altérité du sensible devienne effectivement dans l’image quelque chose du réel.

Extrait des Actes du colloque
"Des formes de la démocratie à la résistance dans la langue", Angoulême 2009.

Kader Mokaddem, philosophe.

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